CERIDWEN ϟ if I look back, I'm lost.

« Lis moi ce paragraphe Noah. »
« Lequel mère ? »
« Le dernier. »
« “ Par la suite, le temps des dragonniers fut révolu. Les elfes et les fées se cachèrent loin du regard des hommes. Ces derniers commencèrent à croire de moins en moins en la magie. Seules quelques rares personnes continuent toujours d'y croire, espérant le retour de l'âge d'or des dragonniers et de cette époque harmonieuse. Pour une raison inconnue, l'ancienne capitale de Thildraigh fut abandonnée et elle est à présent en ruines. Alors, si un soir vous levez les yeux vers le ciel et que vous voyez une pluie d'étoiles filantes tomber, c'est que l'espoir est encore possible d'y croire... “ »(c) contexte le Royaume de Thildraigh.
« Très bien Noah. Nous continuerons demain. »

L’enfant se leva et quitta la pièce non sans avoir au préalable ranger soigneusement le livre posé sur la table. Ereintée, Ava s’affala sur son fauteuil et observa les cheveux blonds de sa nièce disparaître derrière la porte. Dieu qu’elle vivait heureuse depuis que Ceridwen était entrée dans sa vie. Mais par accès de prudence, Ava lui avait tout caché. Elle voulait simplement s’assurer que leur passé ne les rattraperait pas. Aaren était morte deux jours après qu’Ava ait prit dans ses bras cette jeune enfant. Elle l’avait rebaptisée Noah et la vie avait suivit son cours. Ava avait reprit son activité de professeur, enseignant dans le village, au palais et aussi à sa nièce qui l’appelait mère.
À chaque fois, les larmes montaient aux joues de la jeune femme et elle était prise par d’une violente quinte de toux. Si seulement Aaren n’avait point été une Innée, ou quelque créature qu’elle fût. Ava répugnait mentir mais elle ne songeait qu’à protéger sa nièce. Elle prenait tout de même du recul et ne considérait point cette enfant comme sa fille même si la ressemblance était tout de même frappante. En à peine huit ans, Ceridwen avait énormément changé. Son visage autrefois joufflu était devenu doux et fin. Ses cheveux avaient poussés jusqu'à s'étendre au milieu de son dos. Ils étaient blonds, comme ceux de sa tante et avant elle, de sa mère. Et elle possédait bien sûr les yeux verts des Sayan.
Elle avait tenu un rôle de mère ainsi que de professeur. Cette dernière fonction, elle la regrettait de plus en plus. Elle voyait Ceridwen s'attacher aux principes de la couronne, les défendre avec grande éloquence lorsque les livres qu'elle lui faisait lire passait des chevaliers à la magie. Ceridwen était désormais convaincue que la magie n'existait pas, elle ne se doutait point de ses véritables origines. Ava était soucieuse de la réaction de sa nièce si elle venait un jour à apprendre la vérité.

Ceridwen, ou plutôt Noah, avait quant à elle regagner sa chambre située au premier étage de leur modeste maison. La bibliothèque était au rez-de-chaussée, et son unique grande fenêtre donnait sur l'arrière de la maison. Leur jardin était ridiculement petit mais assez grand pour qu'il y pousse un très grand chêne.
Noah ne possédait pas grand chose. Quelques livres et Ava lui avait offert un journal intime où elle pouvait consigner toutes ses pensées. Ava disait que c'était pour améliorer son écriture ainsi que son orthographe mais ce cadeau avait énormément plût à la jeune fille qui s'était empressée d'y écrire chaque jours. Mais pour l'instant, ce n'était pas ça qui l'intéressait. Elle se dirigea vers l'armoire et enfila sa cape pour sortir ainsi qu'un chapeau pour protéger ses oreilles. Le soleil avait beau briller dans le ciel, un vent frais soufflait sur la cité et il était plus prudent d'enfiler une cape.
C'était l'occasion d'aller se balader dans la ville ou même d'aller jusqu'à la lisière de la forêt. Elle sortit donc de la maison pour atterrir en pleine agglomération. La cité était en effet en pleine effervescence lui semblait-il. La foule était dense et partout autour d'elle retentissait de nombreuses conversations. Un marchandage à sa gauche, une mère et son jeune enfant derrière elle ou encore les sabots d'un cheval qui manqua de l'écraser. Elle se décala de justesse sur le côté mais heurta autre chose. Elle perdit l'équilibre et tomba à terre, faisant tomber son chapeau.

Elle releva la tête. L'inconnu qu'elle avait heurté était un homme. Un homme assez âgé quand elle y repensait. On voyait ici et là quelques cheveux blancs et gris qui parsemaient ses cheveux noirs comme l'ébène. Il était aussi de haute stature et quand il la vit, un sourire s'esquissa sur son visage. Ce devait être un homme séduisant dans le passé. Il l'aida à se relever et ramassa le bien tombé un peu plus loin.

« Pardon mademoiselle. Je ne vous avait pas vue. »
« Ce n'est rien monseigneur. Tout est de ma faute. »

Son ton était cordial, et elle se surprit à lui sourire à son tour alors qu'elle remettait son chapeau sur sa tête. Il ne recouvrait pas tout à faite sa crinière blonde sauvage qui retombait en boucles sur ses frêles épaules. Il marqua une pause et son regard se fît interrogateur.

« Tu ressembles trait portrait à une femme que j'ai connue, autrefois. » dit-il. Cependant, la jeune fille ne lui répondit pas. Elle se contenta de baisser la tête et de triturer ses doigts nerveusement. « Son nom était Sailan je crois. »
« Sayan ? » s'écria l'enfant en relevant la tête. Elle le vit acquiescer du regard. « S'appelait-elle Ava ? »
« Ava était sa soeur. Non, elle s'appelait Aaren. Mais tu lui ressembles plus si tu es la fille d'Ava. Tu as les yeux des Sayan bien sûr, mais tu as surtout son visage et sa bouche.
« Vous voulez dire que cette femme est ma mère ? »
« Je n'en sais rien mon enfant. Il me semblait qu'il y a bien huit ou neuf ans, Aaren attendait un enfant. Mais je ne sais rien de ce qui a pu leur advenir... »
« Oh... je vois... »
« Excuse moi mon enfant, je dois m'en aller. À une prochaine fois peut être. »

Et l'homme s'éloigna. Noah fronçait désormais les sourcils. Ses convictions s'en trouvaient sérieusement ébranlées. Elle était cependant persuadée qu'Ava était bel et bien sa mère. Pourtant, le doute s'était lentement installé. Elle chassa cette idée de son esprit et retourna chez elle. L'envie de voir le palais ou le marché lui était passée.

Passé la porte d'entrée, Noah s'écroula sur le divan et étala ses pieds sur la table basse. Le choc fit glisser le livre de sa tante et son marque page tomba lui-même au sol. C'était un médaillon en or et une fissure en couvrait le milieu. Elle semblait avoir été faite dans le but de l'ouvrir et c'est ce que fit la jeune enfant.
Au centre y trônait un petit portrait. Ceux de deux femmes. Les deux blondes et dont les yeux verts ressortaient. Elles se ressemblaient légèrement, mettons que certains traits de leurs visages respectifs faisaient sentir un air de famille. Noah reconnut Ava mais ses yeux s'arrêtèrent sur l'autre femme. Celle qui lui ressemblait le plus. Il était vrai qu'elle avaient la même forme de visage : ronde mais fine. Ses joues portaient le même rose et elles partageaient le même nez aquilin. Il était impossible de ressembler plus à une femme.

Ava quant à elle, était restée travailler dans sa bibliothèque. Une soudaine quinte de toux la força à descendre les escaliers pour y trouver son livre. Après cela, elle comptait s'aliter plusieurs heures et attendre que sa nièce revienne d'une de ses balades. Elle fut surprise de la voir rentrer si tôt alors que chaque jour, elle ne cessait de la réprimander car elle rentrait à des heures indécentes.
Ava retint un cri de stupeur lorsqu'elle vit entre les mains de Ceridwen, son médaillon. Sa sœur et elle y étaient représentées juste avant qu'Aaren n'ait Ceridwen. Elle se dirigea silencieusement vers le divan, décidant de tout révéler à sa nièce dans le plus grand tact.

« Mon enfant. Il faut que je t'expliques. » fit-elle avant de s'asseoir aux côtés de sa nièce. « Mais tout d'abord, ton véritable prénom est Ceridwen. »

Mais Ava ne put continuer. Une violente quinte de toux se déclara. Quelques gouttes de sang tombèrent sur sa robe alors immaculée. Noah se leva précipitamment et aida à lever sa tante jusqu'à sa chambre.
Mais même les médecins ne surent comment guérir ce mal.

« La pauvre enfant... »
« Sa tante était sa seule famille ? »
« Oui. Apparemment, sa mère l'a abandonnée dès la naissance à sa sœur qui l'a alors élevée durant près de dix ans. Mais sa maladie s'est déclarée il y a six ans. »
« Vous voulez dire que la petite a assisté à sa convalescence ? »
« Pire ! J'en ais été le témoin direct ma chère ! La pauvre enfant a multiplié les tâches dans ma maison pour espérer se faire quelques pièces d'or car sa tante, anciennement la professeur de mon fils, ne pouvait plus enseigner. L'enfant a financé la maison, la nourriture et les soins de sa tante ! »
« Bonté divine ! »

Les deux femmes regardaient le cercueil d'ébène posé sur une grande table elle-même faite en chêne. D'innombrables fleurs le couvraient même si Ava Sayan n'avait jamais été très communicative de son amour pour la communauté. Femmes et hommes arpentaient la petite maison soignée où avait vécut Ava et Ceridwen. La silhouette fine de l'enfant désormais âgée de seize ans, se déplaçait entre les convives endeuillés. Elle s'était elle-même occupée de la nourriture, des fleurs et de l'aménagement de la pièce. Il ne manquait plus que les paroles de sa tante qui, en ce moment même, aurait été la seule à pouvoir la réconforter.
Ceridwen essuya rageusement les larmes qui roulaient sur ses joues tandis qu'elle coupait un morceau de pain. Elle comptait le servir avec la charcuterie que sa tante gardait dans sa cave. Ce n'était pas de la mauvaise qualité d'après Ceridwen. Elle se coupa avec le grand couteau qu'elle tenait à la main. Quelques gouttes de sang s'écoulèrent de la petite coupure mais Ceridwen l'ignora et reprit sa besogne. Elle se ferait un bandage plus tard. Elle devait pour l'instant s'occuper des invités proches et éloignés de sa tante. Plusieurs s'étaient invités, revendiquant une certaine amitié avec Ava. L'homme de ses huit ans n'était pas venu lui. Ceridwen aurait tant aimé qu'il lui parle de sa mère. Ava n'avait jamais put lui en parler. Chaque fois qu'une conversation s'éternisait, elle toussait, crachait des filets de sang.

Ceridwen faillit tomber au sol. Cette maison sentait la mort ainsi que les médicaments apportés sans cesse par les médecins. Médicaments qui jamais ne l'auront guérie. Ceridwen avait assisté à tout cela. Elle avait supporté autant de poids que l'avait fait sa tante, la douleur physique en moins.

« Bonjour Ceridwen. »

Ceridwen se retourna. Elle se trouva nez à nez avec sa très chère voisine Nymeria. Elle habitait là depuis quatre ans déjà et elle aidait régulièrement la jeune fille à tenir la maison et à préparer les remèdes pour sa tante. Elle lui avait aussi donner énormément d'argent pour subvenir à ses besoins en échange de quelques bons et loyaux services. Ceridwen la salua d'un signe de tête et essuya une nouvelle fois ses larmes.

« Bonjour Nymeria. Comment allez-vous ? »
« Je me porte à merveille mon enfant. Mais toi, je n'en suis point sûre. Quelle tragédie ! Ava était une très grande femme. »

Pour la première fois depuis que sa tante avait quitté ce monde, Ceridwen s'autorisa un sanglot suivi aussitôt d'un hoquet. Elle sentait que les vannes allaient lâcher et que ses larmes noieraient bientôt la petite maison. Le corps de sa tante inerte et pâle, reposait dans le meuble de bois entreposé plus loin. Son regard glissa jusqu'aux fleurs. Des cadeaux obséquieux encore une fois.
Nymeria la prit dans ses bras et lui caressa les cheveux tout en la berçant. Elles parleraient des choses sérieuses plus tard. Où l'enfant allait-elle vivre désormais ? Nymeria l'aimait telle une fille pour avoir prit soin d'elle durant quatre ans. Mais elle savait que jamais elle ne remplacerai Ava. Elle connaissait tout de l'histoire de Ceridwen et ne souhaitait qu'une chose : qu'elle vive désormais heureuse.

« Ceirdwen, tu n'as probablement pas la tête à ça pour l'instant, mais viens vivre chez moi. Les enfants et moi t'accueilleront à bras ouverts. »

Dans ses bras, elle sentit Ceridwen hocher la tête.

C'était sa quatrième nuit chez Nymeria. Elle souffrait dès qu'elle voyait son ancienne maison chaque jour en passant devant. Il était tard. Minuit d'après ses calculs. Elle avait tenté de découvrir si elle avait des pouvoirs. Avant de quitter son ancienne demeure, elle était tombée sur le journal intime de sa tante Ava. Elle y consignait tout. Nombre de ses questions y avaient trouvé des réponses. Mais elle avait par dessus tout découvert que sa mère était une Innée. Elle avait trouvé le mandat d'arrestation qui avait conduite Aaren à sa mort. Mais il n'y avait aucune mention d'un père dans ces lignes.
Le journal était sur la table de nuit. Une unique bougie éclairait la pièce étriquée. Contrairement aux deux filles de Nymeria, elle avait bénéficié de sa propre chambre. Elle en profitait pour s'essayer à la magie. Ses convictions avaient été sérieusement ébranlées après qu'elle eut apprit que sa mère était une Innée. Et si elle en était une aussi ? Elle ne voulait pas risquer la mort et faire de la peine à Nymeria.

Elle s'allongea sur son lit après des tentative infructueuses. Elle était déçue mais à la fois soulagée. Mais elle se savait incapable de trouver le sommeil. Elle pensait sans cesse à a sa tante et à sa maladie. Elle redoutait que ce soit de famille et qu'un jour, ce mal inconnu ne la touche elle aussi. Elle ne désirait pas que ses futurs enfants souffrent autant qu'elle, voir plus.
Les yeux grands ouverts, elle regardait le plafond. Puis elle se tourna sur le côté et souffla sur la bougie. Les ténèbres l'encerclèrent et dans l'ombre, elle crut discerner les silhouettes monstrueuses de ses cauchemars. Soudain, une effervescence. L'entière maisonnée sembla d'un seul coup, se réveiller entièrement. Nymeria frappa à sa porte et Ceridwen se précipita pour aller ouvrir.

« Mon enfant ! Prépare toi vite ! Comme Eliane est absente, tu vas la remplacer. D'accord ? »

À son ton, Ceridwen comprit que c'était plus un ordre qu'une question et elle enfila rapidement quelques vêtements chauds pour faire face à la nuit. Elle suivit Nymeria au bas des escaliers et vit qu'elle portait multiples serviettes et autres outils qu'elle ne put analyser. Nymeria s'activait, courait dans tous les sens pour réunir ses outils dans une grande sacoche qu'elle confia à la jeune fille.

« Un heureux évènement mon enfant ! » dit-elle avec un grand sourire.

C'est ainsi que Ceridwen assista à son premier accouchement.

Ceridwen revenait du château. Son cheval trottinait doucement derrière elle. Bien sûr, elle le tenait encore par la bride pour éviter qu'il ne s'enfuit. Dans sa main, elle tenait une pomme rouge qu'elle s'empressa de donner à sa monture qui lui semblait affamée. Ceridwn étai devenue prévenante grâce aux leçons prodiguées par Nymeria.
Depuis ses seize ans, elle accompagnait cette femme qu'elle appelait marraine, dans tous ses accouchements au point qu'elle désirait elle-même devenir sage-femme. Autour d'elle, les trois enfants beaucoup plus âgés avaient déjà quitté la demeure familiale et elles étaient désormais seule dans leur grande maison.

Peu à peu, Nymeria avait vu sa petite protégée grandir et devenir belle comme sa tante l'était autrefois. Elle avait réussit à lui faire retrouver la joie de vivre. Leçons d'équitation, une bibliothèque qui lui était destinée, une grande chambre ainsi que plusieurs autres choses qui aidèrent Ceridwen a penser à autre chose. Mais ce qui la remplit le plus de joie, c'est quand Nymeria lui offrit le médaillon de sa tante. Elle l'avait retrouvé parmi les livres qu'elle était partie vendre. Il servait de marque-page, tout comme la première fois que Ceridwen était tombée dessus. Elle portait tout le temps désormais.
Ceridwen l'accompagnait partout. Nymeria était sa protectrice, celle qui lui avait montré la lumière après les ténèbres. Mais ce qui plaisait le plus à la jeune femme, c'était donner la vie.